Mariage New yorkais. © Philippe Dollo

Photographier NEW YORK, la Cité fragile, 1996-2008 – Projection-conférence 24 septembre 2022


Mariage New yorkais. © Philippe Dollo

Mariage new yorkais. © Philippe Dollo

Ça a commencé dès l’enfance cette obsession de la ville, avec tous ces livres d’images trouvés dans le bibliobus et que l’on ramenait fébrilement à la maison après l’école. Et aussi ce son particulier qui émergeait du kaléidoscope urbain des films du dimanche soir, puis plus tard, à l’adolescence, New York encore à la dernière séance des cinémas d’Art et d’Essai parisiens. Et toujours New York, cette fois dans les livres des grands maitres de l’image qui faisaient rêver le jeune photographe.
En 1996, le mythe percute la réalité… Nous voilà à New York! Oui, mais alors, qu’est ce qu’on fait maintenant? Que diable va t’on apporter de plus à tout ce qui a déjà été fait? Est-ce bien un New York réel que je photographie ou cette vieille ville imaginaire, bâtie de toute pièce par les rêves de l’enfance?

Parfois, l’objectif de Philippe Dollo capture une ville qui aurait jadis existé ou n’existerait pas encore. Ici un New York interlope, où se dessinent, moins par manque de lumière que par vélocité, des béances et des lignes de fuite, surprises dans leur précipitation. Dollo étudie New York pour revenir au sens alchimique de la photographie, »la naissance d’un corps solide insolubre dans une phase liquide ».
En oracle, E. B. White imaginait sa paralysie, son asphyxie, son engloutissement – en clair : son autodestruction. Aucun des fléaux envisagés n’a encore emporté New York. Peut-être parce que la ville est à la merci constante d’un détraquement. Il suffit d’une panne de courant, de l’apparition soudaine d’une nappe de brouillard sur les cimes de béton pour rappeler à l’inconscient les dimensions colossales de la vulnérabilité urbaine, et de la nôtre. En septembre 2001, quand le noeud névralgique de « downtown » est sectionné, NYC est une ville disloquée, précaire, interrompue. A « Ground Zero » la blessure infligée est irréparable, et tourne à la nécrose.
Les grandes villes, soudain, redécouvrent ce qu’elles sont véritablement: des cités fragiles.
David Boratav